Tardivement, et je m'en excuse, cher Forn :En général, on évitait soigneusement d’évoquer directement la mort, ce qui était considéré comme dangereux et de mauvais augure. On préférait user de formules telles que "il est allé à son destin" ou "son destin l’a saisi".
Malgré ces efforts pour en éloigner la pénible réalité, la mort était, tu t’en doutes, néanmoins très fréquente (famines, inondations, maladies, guerres…) dans la vie des Mésopotamiens, sans toutefois susciter une fascination comme celle qu’éprouvèrent les Egyptiens à son égard. Leurs sentiments devaient ressembler aux nôtres à ce sujet, il considéraient par exemple "injuste" et "contraire au destin" la mort de jeunes gens, ou d’enfants, qui n’avaient pas eu le temps d’accomplir quoi que ce soit dans leur courte vie.
Témoin de leur fatalisme, cet extrait de Gilgamesh :
"
Seuls les dieux vivent à jamais sous le soleil.
Quant à l’homme, ses jours sont comptés ;
Quoi qu’il fasse, ce n’est que du vent ! "
La croyance d’une vie après la mort était bien ancrée dans la mentalité mésopotamienne. Selon certains textes, le lieu où elle se déroulait se nommait l’
arallu, le Grand En-Bas, au sein duquel se dressait une grande ville, siège du palais d’Ereshkigal et de Nergal que l’on atteignait après traversé un fleuve à l’aide d’un "batelier infernal"
(tiens, tiens, Charon n'est pas loin !).
Mais cette vie outre-tombe n’avait rien de "paradisiaque" (au propre comme au figuré) ! Le défunt subissait un jugement concernant son admission dans le monde des morts (en cas de rejet, il était condamné à errer de par le monde sous forme de spectre ), puis rejoignait les autres défunts pour mener éternellement une "vie" morne et misérable ("
Où la poussière nourrit leur faim et leur pain est l’argile, où ils ne voient pas la lumière, ils restent dans les ténèbres, ils sont vêtus, tels les oiseaux, d’un vêtement de plumes. Sur la porte et le verrou s’étale la poussière…), adoucie par la possession des quelques objets enterrés avec lui.
On a trouvé une personnification de la mort sous la forme d’une statuette d’un dieu mineur, dépendant du dieu de la justice, dans le temple de Marduk à Babylone.
Il était considéré comme sacrilège de troubler le repos des morts, ceux-ci étant supposés conserver la personnalité du défunt. Cet interdit moral ne semblait pas s’appliquer (ou être aussi strictement respecté) au mobilier funéraire, un roi babylonien ayant sérieusement envisagé d’ouvrir la tombe d’un ancêtre pour y récupérer du bronze !
Il semblerait que le corps des défunts était habillé le plus richement possible avant d’être inhumé (car l’enterrement était de règle en Mésopotamie, bien que quelques rares cas de crémations aient pu être prouvés), puis il était accompagné jusqu’à sa dernière demeure par un cortège funèbre poussant moult lamentations. Il était traditionnel de déchirer ses vêtements et/ou de se couvrir la tête de la poussière du chemin.
Les sépultures (systématiquement enfouies) sont généralement regroupées à l’extérieur des villes dans des nécropoles. Toutefois, selon les lieux et les époques, les défunts pouvaient tout aussi bien être enterrés dans un caveau familial situé sous le sol du lieu d’habitation.
Une fois paré, le corps pouvait être simplement porté en terre dans une fosse creusée à même le sol, ou être déposé dans un cercueil (en terre cuite, en bois, ou encore en pierre) à l’intérieur d’une tombe en brique ou en pierre (mais toujours souterraine).
Conformément à la nature humaine, et ce, quel que soit le lieu ou l’époque, les tombes collectives mésopotamiennes hiérarchisaient les défunts en fonction de leur catégorie sociale (voir notamment le fameux "Cimetière Royal d’Ur") : la décoration et le mobilier funéraire variant ainsi, en nombre et en richesse, selon le rang social du trépassé.
Une fois le défunt enterré, il revenait à l’aîné de la famille (masculin) de présider régulièrement une cérémonie du culte des ancêtres, constituée d’offrandes de nourriture et d’objets, de sacrifices animaliers et, en Phénicie notamment, de banquets célébrant les défunts durant plusieurs jours.
Laisser un cadavre sans sépulture était une terrible malédiction, adressée fréquemment aux ennemis, ou en tant que menace planant sur les éventuels parjures lors de serments et/ou traités.
Bon, c'est assez succinct, mais ça donne une bonne idée des pratiques les plus courantes.